On vous en a parlé l’année dernière, mais suite à « l’affaire Air Miles » les législateurs québécois se sont saisis de la question de l’expiration des points et ont voté une loi dite 134 qui impacte les programmes de fidélité.
Cela a commencé en Ontario où les députés avaient légiféré en 2016 (loi 46). Le projet de loi du Québec semblait aller plus loin et on en avait déjà senti les effets car Alaska Airlines et MBNA ont arrêté de promouvoir leur carte de crédit dans la province en anticipant semble-t-il une plus grande protection au profit des consommateurs.
Les règlements relatifs à cette loi ont été publiés et rentreront en vigueur graduellement.
Tout d’abord tous les programmes de fidélisation ne sont pas couverts par la loi 134 dite « Loi visant principalement à moderniser des règles relatives au crédit à la consommation et à encadrer les contrats de service de règlement de dettes, les contrats de crédit à coût élevé et les programmes de fidélisation ».
2 types de récompenses sont exclus par les deux premiers articles :
Les autres programmes, dits « institutionnels », sont plus lourds. On parle ici des Aéroplan, Air Miles et ceux des grandes institutions financières au Canada. Ces programmes peuvent être soit offerts directement par l’entreprise comme c’est le cas des programmes bancaires ou avec un partenaire comme Aéroplan.
La principale mesure appliquée par la loi et qui rentre en vigueur le 1er août 2018 réside dans l’interdiction de faire expirer les points après un certain temps. C’était le cas pour Air Miles avant qu’ils fassent marche arrière en 2016 ou Aéroplan avant le changement de politique du programme en 2013.
L’entreprise a toutefois le loisir de faire expirer les points gagnés si le compte ne présente pas d’activité pendant un an ou plus et après avoir notifié le client entre 90 et 30 jours à l’avance via un message explicite (i.e. pas enfoui dans une liste de diffusion marketing).
Le message est clair pour les programmes comme Aéroplan, car toute activité repousse cette échéance. Comme on l’explique dans notre article dédié, il suffit de faire un petit achat via la netboutique sur Amazon par exemple pour générer une activité.
Mais d’autres programmes sont plus restrictifs comme Air France Flying Blue qui requiert de voler au moins une fois tous les deux ans ou de payer avec une carte de crédit émise en partenariat avec la compagnie aérienne. Sont donc exclus les transferts, achats dans une boutique partenaire, etc. Même si le délai de deux ans semble raisonnable, on ne sait si la loi permet de limiter la notion d’activité.
C’est ici que les choses deviennent plus intéressantes. La loi introduit la notion d’unités d’échange pour parler des points et miles acquis. Et ces unités de conversion ont une valeur au moment où on les gagne. Celle-ci ne peut pas être modifiée drastiquement. Voici ce qui est énoncé (avec notre emphase) :
79.6.6. Est interdite la stipulation qui permet de modifier les éléments suivants d’un contrat relatif à un programme de fidélisation à durée indéterminée : a) le nombre d’unités d’échange reçues et non utilisées par le consommateur; b) le facteur de conversion utilisé afin de convertir les unités d’échange déjà reçues et non utilisées par le consommateur.
Mais aussi que :
79.6.7. Est interdite la stipulation qui permet d’augmenter de façon disproportionnée le nombre d’unités d’échange requis pour obtenir un bien ou un service à moins que cette augmentation ne soit justifiée par une augmentation significative de la juste valeur marchande.
L’interprétation de ces deux articles risque d’être intéressante. On parle souvent de la valeur des miles et points. Nous leur donnons une valeur mais celle-ci est somme toute subjective car elle dépend de beaucoup de facteurs comme :
Comment va-t-on juger du changement drastique? Doit-on la comparer avec l’inflation? Le cours du pétrole pour les compagnies aériennes? Cette mesure sera mise en application à partir du 1er août 2019.
Le champ d’action de la loi et sa préoccupation sur l’expiration des miles sont louables, il était temps de protéger les consommateurs des politiques d’expiration trop dures. Quant à la protection de la valeur des points et miles, sur le papier on aime l’idée de pouvoir se protéger contre une dévaluation et la loi semble laisser de la flexibilité aux compagnies pour ajuster la valeur. On verra avec le temps si cela peut faire peur à certaines compagnies qui retireraient leur programme du Québec.
Les économies, c’est par ici :